ÉDITO DU PÈRE ARNAUD MONTOUX

Une raison éclairée par la foi

Depuis quand n’avons-nous pas vécu une rentrée aussi incertaine ? Que reprendrons-nous de nos activités jusqu’ici habituelles ? Quand ? Dans quelles conditions ? Qui pourrait le dire aujourd’hui ? Personne ! Nous sommes dans un brouillard qu’il est bien difficile de percer. La situation inédite dans laquelle nous sommes plongés n’est pas seulement suspendue au virus, à la reprise ou à l’extinction de l’épidémie ; elle est le résultat d’une combinaison complexe dont il faut avoir conscience pour mieux l’appréhender et pour ne pas perdre pied.

Depuis des décennies, nos sociétés occidentales grandissent dans un idéal de croissance et de sécurité parfois chahuté, mais jamais fondamentalement remis en question. Cette situation nous a conduits à penser qu’il ne pouvait plus rien nous arriver, et que nous étions définitivement sortis des temps sombres de l’incertitude. Il en résulte que nous tenons nos dirigeants pour les garants de cette sorte d’« acquis social » que personne n’a l’intention de remettre en question.

À ce mythe de croissance et de sécurité inflexibles, s’ajoute la judiciarisation de toutes les relations sociales : si une faute est commise, si une insatisfaction ou un conflit surviennent, on accuse, on dramatise, on stigmatise, on utilise, et tout se termine invariablement au tribunal avec, si possible, de grosses sommes à la clef.

La conjugaison de ces éléments avec l’irruption de ce virus encore mal connu, crée une situation fort problématique. Les risques sanitaires sont réels, la maladie peut se révéler très grave et nous le savons : nous connaissons tous des familles endeuillées dans notre entourage ; mais à côté des éléments objectifs que nous avons du mal à cerner, nous devons affronter les mille-et-une contraintes qui ne sont pas seulement liées à la gestion du problème sanitaire, mais à la gestion des relations dans une société où chaque groupe attend l’occasion la plus propice d’accuser l’autre de mauvaise gestion, et d’utiliser les malheurs du temps pour détruire son voisin. Si le gouvernement fait ça, on l’accuse, s’il ne le fait pas on l’accuse aussi ; à tous les niveaux, les responsables se couvrent, les irresponsables râlent, les incapables diffusent leurs recettes qui ne valent rien, les financiers cherchent à tirer profit et plus personne n’arrive à poser un pied devant l’autre. Le grand danger c’est que toute cette cacophonie orchestrée par un individualisme incontinent favorise l’effritement de la société… Chaque groupe s’enferme dans une compréhension ésotérique du monde favorisant les théories rocambolesques, la peur et la haine de ce qui ne rentre pas dans ses vues… mais cette logique communautariste ne nous permettra pas de sortir de l’ornière.

Seigneur, donne-nous assez de sagesse et de discernement pour supporter patiemment les contraintes du temps ; donne-nous un esprit raisonnable pour démêler méthodiquement l’écheveau des problèmes ; donne-nous un cœur résolu pour nous engager au service du bien ; donne nous une âme assez catholique pour ne pas rêver de solutions égoïstes.

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