Lectio divina : lecture de la parole de Dieu en dialogue avec Dieu — Formation

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Lectio divina : lecture de la parole de Dieu en dialogue avec Dieu

La lectio divina, c’est, en partant de la multiplicité des Écritures, retrouver l’unité de la Parole. Cela ne peut se réaliser qu’en demeurant dans les Écritures, en les parcourant inlassablement, en les méditant, en laissant les événements, rapprochés et reliés entre eux, redevenir Parole pour nous.

Article paru dans la revue diocésaine Église dans l'Yonne n°5-2019, en page 18-19. Thème du dossier de ce mois de mai 2019 : “la parole”.

Lire la Bible

Lorsqu’il s’agit de lire la Bible, il devrait être assez naturel pour un chrétien de se référer d’abord à la pratique des premiers disciples et de Jésus.

Pour Jésus comme pour ses disciples la Parole de Dieu est celle reçue par Moïse au mont Sinaï et transmise de génération en génération par la Tradition d’Israël. Ce sont ces Écritures qui sont l’objet de leur écoute et de leur méditation. Il devrait en être ainsi pour nous tous… Or pensons-nous seulement à ouvrir le Premier Testament ? C’est pourtant le premier pas de la lectio divina.

Dans l’Évangile, il est un texte clef, qui contient des leçons d’écoute des Écritures, mises dans la bouche même de Jésus : le récit d’Emmaüs, (Lc 24, 13-35). Suivons la leçon pas à pas.

Deux hommes marchent avec un inconnu qui leur livre une relecture des derniers événements qui concerne leur Maître, Jésus, à la lumière de “Moïse, de tous les prophètes”, leur ‘ouvrant’ toutes les Écritures ; ils reconnaîtront Jésus à la fraction du pain mais Luc insiste sur un élément précédent : le cœur des disciples ‘brûlait’ en eux à cette ‘ouverture’ des Écritures.

Trois points majeurs émergent de cette leçon   

1. Le rapport de Jésus aux Écritures : elles le ’concernent’ (v. 27) et c’est lui qui en ‘donne l’intelligence’ (v. 32). Le Premier Testament parle de Jésus’ : sa signification profonde est christologique… et nous l’avons presque oublié !

Voilà le ‘mode d’emploi’ de lecture chrétienne des Écritures, l’horizon de toute lectio divina. C’est le Christ qui se révèle dans les Écritures.

2. Les Écritures sont comprises dans une structure tripartite, Moïse, les Prophètes (de Josué aux Douze petits prophètes), à côté des Écrits (v. 27) ou des Psaumes (v. 44). Ceci peut s’éclairer sans peine : pour Jésus, à l’écoute de sa tradition juive, cette tripartition signifie d’abord que, si tout a été dit dans la Loi de Moïse, tout a été répété dans les Prophètes, repris et répété encore dans les Hagiographes, selon les trois temps de l’histoire sainte d’Israël. C’est un “cadeau pédagogique” de Dieu et une clef fondamentale de l’interprétation. Les grands événements qui sont des interventions de Dieu dans l’histoire se répètent selon des schémas constants qui vont s’approfondissant. Ainsi, par exemple, la sortie d’Égypte et l’Exode sont “modèle” pour le retour de l’exil de Babylone, et la longue marche d’Abraham d’Ur en Israël en est comme l’anticipation ; et Luc présentera le mystère pascal de Jésus à Jérusalem comme un ‘nouvel exode’ (Lc 9, 31). Ainsi encore, l’alliance est une relation du peuple avec son Dieu, qui se répète d’Abraham à Moïse, de Josué à la nouvelle alliance de Jérémie et à l’alliance éternelle dans le sang de Jésus : ce sont ces relectures qui font sens… ce sont elles qu’il faut repérer en parcourant et reparcourant “toutes les Écritures”. C’est le cœur de toute lectio divina.

3. Lorsque Jésus interprète les Écritures, les intelligences ‘s’ouvrent’ comme les yeux et comme les Écritures (v. 31, 32) et “les cœurs brûlent” (v. 32) au-dedans des disciples.

Ce mot ‘ouvrir’ signifie d’abord l’ouverture du cœur ou de l’intelligence des auditeurs au message des Écritures. Et l’ouverture dans le récit des pèlerins d’Emmaüs fait brûler le cœur de disciples qui reconnaissent Jésus dans sa Parole, alors qu’il donne le sens de sa vie et de sa mort. Jésus n’a pas expliqué l’Écriture, il a ‘ouvert’ le cœur des disciples à l’intelligence des Écritures.

Et c’est par rapport au Don de la Loi au mont Sinaï ‘dans le feu’ (Dt 4,4) qu’est présentée cette expérience.

Après Moïse, comme Jésus, le bon interprète, lecteur des Écritures, est amené à refaire l’expérience du Sinaï, réentendre une Parole unifiée, dite par Dieu à son cœur, à travers l’apparente diversité des événements et des paroles des Écritures. Et le ‘cœur brûlant’ est l’écho concret de ce feu qui accompagnait la révélation de la Parole au mont Sinaï.

Retrouver l’unité de la Parole

Les textes inscrits en marge, les notes de nos Bibles, sont le premier outil pour commencer à entendre l’écho de toutes les façons dont un événement a été repris au long de la Bible. Pour approfondir la recherche, il existe aussi la Concordance de la TOB (en français et maintenant sur internet) qui permet de circuler d’un texte à l’autre à partir des mots et des expressions typiques, sans cesse réutilisés dans des contextes différents.

C’est un travail persévérant qui nous est proposé, mais il n’en est pas de meilleur pour comprendre les Écritures et y découvrir le visage du Christ Jésus. 

frère Matthieu, abbaye de la Pierre-qui-Vire