L'armée de l'ombre

J'arrive trop rarement en avance à la messe, et c'est dommage. Car c'est là qu'on voit l'animateur de chant ouvrir son micro, s'éclaircir la voix, on voit les enfants de chœur préparer l'autel, les objets liturgiques. On voit le dernier coup de balai, la main discrète qui redresse une fleur. Alors c'est un déclic, on voit... ce qu'on ne remarque pas d’habitude : les chaises ont été rangées, les consignes barrière posées. Le chauffage a été allumé, suffisamment tôt, les linges blanchis et repassés. Des personnes ont préparé les chants, les intentions, les annonces, imprimé les feuilles de messe. D'autres se tiennent à l'entrée, offrent du gel, des masques, les feuilles du jour. Chorale et organiste ont répété, des lecteurs se succèdent pour lire les textes.

L'effet de ce déclic est garanti : au lieu de ruminer les nouvelles moroses, on s'émerveille. Car c'est une armée que l'on voit : les personnes qui apportent aux personnes âgées ou malades cette communion dont ils sont privés ; celles qui accompagnent le caté, l'aumônerie, le catéchuménat, rencontrent les couples qui préparent leur mariage, le baptême de leur enfant ; accueillent les familles en deuil, célèbrent les obsèques ; tiennent les comptes, les registres, veillent au matériel, diffusent les infos ; se réunissent pour échanger, prier, partager, ou juste là à point pour le coup de main indispensable...

Que de gestes donnés ! Mis bout à bout, ils forment notre paroisse, ce tissu de relations dont notre prêtre est le cœur, au service des meilleurs antidotes contre la grisaille, la Foi et l'Espérance.

Roseline DL