La puissance de sa résurrection — Diocèse de Sens & Auxerre

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La puissance de sa résurrection

Édytorial de la revue diocésaine de mars 2021, par Mgr Hervé Giraud.

"Les semaines, les jours à venir, seront décisifs…”, telle est l’expression qui nous est servie très fréquemment, sans doute même trop souvent, par l’ensemble des médias et autres réseaux sociaux. Et cela nous laisse volontiers penser qu’il y aura un après, que sans revenir au “bon vieux temps”, nous serons libérés du virus ou, tout au moins de sa nocivité. Dès lors surgissent des questions qui aident soit à oublier le présent soit à le vivre : “Comment rebondir ? Comment repartir ? Comment reprendre une vie normale ? Quel sursaut économique… ou ecclésial ? En quoi ou en qui puiser pour revivre ou vivre tout simplement ?

La fête de Pâques, au cœur de la foi chrétienne, dessine à ce propos une excellente piste. De même que Jésus a vécu la mort et la résurrection, nous constatons, comme le père Timothy Radcliffe, que “nous mûrissons en passant par de petites morts et de petites résurrections”. Quotidiennement, nous franchissons des écueils plus ou moins périlleux pour mieux nous relever et, finalement, nous élever dans une conscience renouvelée du sens de notre vie. Une chute, physique ou morale, un accident dans la belle linéarité de nos ambitions, aussi légitimes soient-elles, peut constituer le révélateur d’aspirations nouvelles et qui nous seront bénéfiques.

D’une certaine manière, la discontinuité qu’a constituée la pandémie, et surtout dans le choc collectif du premier confinement, nous oblige à reconnaître ce qui a permis que la vie se poursuive. En premier lieu, cela nous est apparu comme une prise en compte de la fragilité commune de notre condition humaine. Puis la réaction internationale donnant, en règle générale, une priorité à la santé publique a pu se traduire en bien des lieux par de beaux actes de solidarité. La fraternité, révélée par le Christ comme l’amour inconditionnel du prochain, s’est donc manifestée de façon éloquente comme le seul remède véritable à nos limites humaines.

Mais, à travers ces tribulations, nous devons aussi reconnaître qu’une puissance de vie est demeurée en nous comme autour de nous, envers et malgré toutes les difficultés rencontrées. Et d’où vient-elle sinon de la “puissance de Dieu” qu’évoque saint Paul : “Certes, le Christ a été crucifié dans sa faiblesse, mais il est vivant par la puissance de Dieu. Et nous aussi sommes faibles avec lui, mais nous serons vivants avec lui par la puissance de Dieu envers tous” (2 Co 13, 4). À parler de faiblesse et de fragilité, y compris en observant la réalité de Dieu livrée aux scepticismes variés de ce monde, on en oublie une puissance fondamentale : celle de la vie, de Sa vie, de la vie nouvelle reçue au baptême.

Comme les chrétiens d’Ephèse, par l’entremise de saint Paul, la Parole de Dieu exhorte à s’“armer de puissance par son Esprit pour que se fortifie en vous l’homme intérieur” (Ep 3, 16). Il ne suffit donc pas de nous armer de patience en ce temps de pandémie : il faut encore nous armer de la puissance spirituelle. Elle nous a déjà été confiée et débordera toutes les frontières que nous lui mettons. Cette puissance, pour être plus précis, est celle qui s’est manifestée à Pâques, celle dans laquelle chaque chrétien est baptisé, celle qui prend sa plénitude dans la confirmation et agit dans tous les sacrements. Notre feuille de route vers Pâques et pour tout le temps pascal nous conduit à reprendre à notre compte ce que l’apôtre Paul expliquait aux Philippiens : “Il s’agit pour moi de connaître le Christ, d’éprouver la puissance de sa résurrection…” (Ph 3, 10).

Car être témoin de la résurrection, au nom de notre baptême, ne nous confine pas dans la simple attestation verbale, aussi authentique soit-elle. Avoir la grâce de la foi en Jésus Christ mort et ressuscité doit nous être une invitation permanente à éprouver cette “puissance de résurrection” dans notre vie certes appelée à cette rédemption définitive mais aussi capable d’en éprouver quotidiennement la réalité. À chaque instant qui nous est donné de vivre et d’agir en chrétien, nous pouvons témoigner que c’est bien Dieu qui, “par sa puissance, a ressuscité le Seigneur et nous ressuscitera nous aussi” (1 Co 6, 14).

La simplicité des gestes et des paroles de l’Évangile de Jésus Christ est une exhortation à apprécier la vie dans tout ce qui la rend digne de son créateur. Il ne s’agit pas de naïveté, ni d’angélisme, et encore moins d’une froide doctrine anesthésiant la réalité. En faisant jaillir la vie, une vie nouvelle, au matin de Pâques, Dieu s’est aussi manifesté comme la source de toute résilience. S’il a voulu que l’humanité soit relevée, c’est bien pour qu’elle soit capable d’accéder à des réalités nouvelles, qui lui étaient cruellement étrangères. Sachons donc, près de deux mille ans après cet événement historique, participer à cet élan en reconnaissant que nous sommes “ressuscités avec le Christ” (Col. 3, 1).

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