Une conversion à la modestie

Au fil des mois, Laudato si’, la lettre adressée à nos frères en humanité par le pape François concernant notre maison commune, trouve un écho considérable, que ce soit dans les médias, grâce à des reportages saisissants, ou plus simplement dans l’opinion publique.

La pandémie mondiale nous impose un rythme de vie plus sobre. La rupture peut nous paraître brutale et paralysante. Cependant, nous sommes toujours vivants, alors que voici presque un an que nous vivons autrement.

Peut-être que nous percevons davantage que nous pouvons vivre de façon plus sobre, que cela est possible. Certes, les temps de convivialité et de fraternité nous manquent cruellement. Est-ce tenable durablement ? Hormis ceux qui sont épris d’autoritarisme et qui ont une aversion profonde de la liberté des personnes, nous ne pouvons pas nous accommoder durablement de cette situation.

Cependant, l’épreuve que nous traversons nous démontre que nous sommes capables de vivre dès maintenant une conversion écologique.

Vivre selon un nouveau rythme de vie, avec moins de déplacements superflus, moins de consommation, finalement inutiles.

La peur de la pandémie nous a conduits à laisser à notre planète un temps de respiration. La perspective de la mort nous a fait vivre brutalement autrement.

Si nous écoutons plus attentivement l’enseignement du Saint Père quant à notre capacité de vivre autrement dans notre maison commune, nous comprenons rapidement que le nouveau style de vie qu’il nous faut adopter, n’est pas de l’ordre de la peur, mais de la fraternité et de l’audace d’aimer selon l’Évangile.

Si le Saint Père insiste fréquemment sur les cohérences qui conduisent à la vie selon la joie de l’Évangile, c’est parce qu’il tient à souligner, comme aime à le rappeler saint Paul, que ce qui donne cette cohérence, c’est l’amour (1Corinthiens 12). Ce qui donne de l’audace et qui permet de se transcender, c’est l’amour.

Éclairé par de nombreux experts, le Saint Père a cherché à ouvrir un chemin de conversion écologique et d’écologie intégrale. Fréquemment, il insiste sur les liens entre la fraternité humaine et notre rapport avec la maison commune. La brutalité peut conduire nos pensées et nos actions ; la fraternité peut modeler notre façon d’être, aussi bien entre nous qu’au sein de notre maison commune. Cela peut éclairer notre créativité, notre ingéniosité ; c’est sans doute la condition nécessaire pour un avenir heureux.

Tout est lié : le Saint Père aime à le rappeler. Prendre conscience des interactions complexes entre le comportement des humains dans les domaines économiques et sociaux et la dégradation de notre maison commune, peut effectivement être très utile.

Prendre conscience de la complexité des interactions entre des domaines différents de la vie terrestre est très difficile. Bon nombre d’experts, de scientifiques s’y emploient. Leurs recherches sont utiles et fructueuses lorsqu’elles concèdent une certaine modestie. Un chercheur modeste poursuit sa recherche, un chercheur bardé de certitudes assène son idéologie et fige toute progression éventuelle.

Ce que nous traversons depuis presque une année avec la pandémie du Covid-19, qui nous a tous surpris, illustre cruellement ce constat.

Depuis plusieurs mois, les affirmations qui se sont privées d’un minimum d’humilité et de modestie, nous ont montré leur inutilité. Est-ce, pour les croyants que nous pouvons être, le rappel que toute conversion ne peut se conjuguer qu’avec une certaine humilité et modestie ?

Que ce soit au plan de notre vie de foi personnelle, que ce soit au plan de notre vie fraternelle, au sein de nos paroisses et de leur avenir, que ce soit au plan de la proposition de la foi auprès de nos frères en humanité, le chemin plausible qui ouvre à un avenir n’est-il pas dans une conversion à la modestie ?

“Déployant la force de son bras,
Il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leurs trônes,
Il élève les humbles.”