Retour sur la messe chrismale 2022 — Diocèse de Sens & Auxerre

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Retour sur la messe chrismale 2022

Mardi 12 avril 2022 s'est tenu la messe chrismale en la cathédrale d'Auxerre.

Au cours de cette célébration, les huiles saintes ont été bénites et les synthèses des contributions au Synode 2023 des paroisses, services diocésains,  mouvements d'Église, Fraternités... ont été apportées et confiées à l'équipe diocésaine. 

Retour en images sur la célébration

 

Retrouvez l'homélie prononcée par Mgr Hervé Giraud

« L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres. » Ces deux versets évangéliques mériteraient d’être toujours associés : être consacré ce n’est pas être séparé des autres, mais au contraire, être envoyé porter l’Évangile aux pauvres. Autrement dit nous tourner vers ceux qui ne comptent pas, qui n’ont que rarement la priorité de nos attentions. Ce soir, dans la suite de la lettre synodale sur le baptême des enfants, et dans la perspective du bicentenaire du diocèse de Sens et Auxerre, je voudrais m’arrêter sur deux mots difficiles mais qui sont liés au baptême : prêtre et sacerdoce.

Qui est prêtre ? Qu’est-ce qu’être prêtres ? Qu’est-ce qu’un sacerdoce ? La question peut paraître cléricale, hors sol, hors de notre actualité électorale ou internationale. Mais elle peut être aussi essentielle à l’heure où le témoignage de l’Église, à travers sa démarche synodale, demande à être converti. Je vous propose donc simplement essayer d’examiner notre manière de comprendre ces deux mots.

Il y a quelques semaines se tenait, précisément, à Rome un colloque sur le sacerdoce. Certains ont pensé qu’il s’agissait de parler des prêtres, du ministère presbytéral, voire du célibat. Or le cardinal Ouellet - organisateur du colloque - avait bien pris le soin de remettre les pendules à l’heure. Selon lui, il nous faut partir du Christ, de son unique sacerdoce. Il déplorait un déséquilibre : « Il y a la surestimation d’une forme de sacerdoce au détriment de l’autre forme, baptismale, hélas ! presque oubliée dans le monde catholique. » Le cardinal souhaitait ainsi, par ce colloque, contribuer à faire disparaître « une mentalité cléricale de pouvoir et une attitude de contrôle excessif des clercs sur l’ensemble de la communauté ecclésiale ». Essayons de sortir de l’oubli.

Il nous faut d’abord partir du Christ ! Oui, il est le seul prêtre. Lui seul est véritablement prêtre, non pas à la manière des prêtres de l’Ancien testament mais… à sa manière ! Jésus a établi, « réinitialisé », le sacerdoce, non pas en offrant des sacrifices - il ne le fait nulle part dans l’Évangile -, mais en donnant sa vie gratuitement, sans rien attendre en retour, dans la confiance absolue en son Père. Il ne s’agit pas, pour nous non plus, de faire des sacrifices pour obtenir des grâces de Dieu, mais il s’agit bien de se donner aux autres par un sens du service, par un sens du bien commun, par un sens de la compassion dont le Christ est l’exemple. « Le Christ commence par dire : Tu n’as pas voulu ni agréé les sacrifices et les offrandes… Puis il déclare : Me voici, je suis venu pour faire ta volonté. Ainsi, il supprime le premier état de choses pour établir le second. » (He 10,8-9). Supprimons donc en nous-mêmes une fausse idée du sacrifice, mais entrons dans le sien, dans sa vie simplement donnée.

Ce sacerdoce du Christ, ainsi compris, le Fils a voulu le partager avec tous les baptisés - je dis bien tous les baptisés y compris les ministres ordonnés. Ce qui veut dire qu’il ne faut plus parler du sacerdoce comme s’il ne concernait que les prêtres. N’entendons-nous pas encore trop souvent des prêtres, des laïcs - et même des évêques - parler du sacerdoce, au singulier « mon sacerdoce », comme s’il ne concernait que les prêtres. Ne parle-t-on pas trop encore d’ordination sacerdotale alors qu’il conviendrait de parler d’ordination épiscopale, presbytérale et diaconale, tel que le rituel le prévoit d’ailleurs. Les mots ne sont jamais neutres. Ils indiquent aussi un rapport au sacré et des rapports entre nous. Or les Écritures sont claires : nous formons un seul peuple sacerdotal. C’est ce que la tradition appelle le sacerdoce commun. L’apôtre Pierre en a parlé dans sa première épître : « Vous, vous êtes … un sacerdoce royal… un peuple destiné au salut, pour que vous annonciez les merveilles de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière. » (1 P 2,9). En une phrase Pierre articule prêtre, roi et prophète : nous sommes tous ensemble un sacerdoce royal qui annonce les merveilles de Dieu. Et c’est pourquoi lors des baptêmes, que notamment les catéchumènes vivront à la veillée pascale, le ministre déclare après l’onction : « Désormais vous participez à sa dignité de prêtre, de prophète et de roi ».

Sacerdoce du Christ, sacerdoce commun, et enfin sacerdoce ministériel. Autrement dit : pour que nous présentions « (notre) personne tout entière, en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu », ce qui est la « juste manière de rendre un culte à Dieu », l’Église a toujours cherché à appeler quelques-uns d’entre nous afin que nous ne prenions pas « pour modèle le monde présent », mais que nous nous transformions « en renouvelant (notre) façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait ». Ces quelques-uns sont des ministres ordonnés, des évêques, les prêtres et les diacres, mais aussi désormais des ministres institués, lecteurs, acolytes, catéchistes, hommes ou femmes. Chaque ministère est un service de la vie baptismale et du corps tout entier.

Donnons quelques exemples. Les évêques rappellent que nous sommes tous des envoyés, que nous ne travaillons pas à notre compte ni isolément. Les prêtres rappellent que le Christ est notre bon Pasteur. Les diacres rappellent que le service des autres demeure l’unique manière de vivre « à la manière de Jésus ». Les lecteurs rappellent la primauté à la Parole de Dieu car « la foi naît de ce que l’on entend ; et ce que l’on entend, c’est la parole du Christ » (Rm 10,17). Les acolytes rappellent l’importance de la prière communautaire et de l’Eucharistie. Les catéchistes rappellent l’importance de nous former, à l’image du Christ qui voyant des bergers sans brebis se mit à les enseigner longuement. Si l’Église fait le choix de cette diversité des ministères c’est certes pour lutter contre le cléricalisme qui demeure en chacun, mais surtout pour que notre attitude chrétienne soit plus juste.

Un seul Prêtre, tous prêtres, quelques ministres pour le service de tous. Voilà une pyramide sans bas et sans haut. Car l’Église n’est pas une pyramide, pas même inversée, pas même égyptienne ou aztèque. Ce n’est pas une image biblique. Les Écritures parlent de Peuple de Dieu, de Corps du Christ, de Temple de l’Esprit. Ce qui compte c’est le baptême que nous avons tous reçus, ou que les catéchumènes vont recevoir à Pâques. Soutenus par tous les ministres, ordonnés et institués, nous pourrons être des fils et des filles de Dieu, et donc être des frères et des sœurs universels. L’enjeu est celui de la Fraternité en Christ. « L’Esprit du Seigneur est sur moi (sur nous) parce que le Seigneur m’a consacré (nous a consacrés) par l’onction. Il m’a envoyé (il nous a envoyés) porter la Bonne Nouvelle aux pauvres. » Une juste compréhension du sacerdoce devrait nous conduire à une manière renouvelée de vivre la mission, sans prosélytisme, et dans la paix donnée elle aussi par le Christ.

Préface du jour
Tu as voulu que son unique sacerdoce demeure à jamais dans l’Église.
C'est lui, le Christ, qui donne au peuple racheté la dignité du sacerdoce royal ;
et, dans son amour fraternel, il choisit aussi des hommes qui,
en recevant l'imposition des mains, auront part à son ministère.