Interview du Père Romain — 9. Paroisse Sainte-Alpais

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Interview du Père Romain

A l'occasion de son 10e anniversaire d'ordination presbytéral, nous interviewons le curé de notre paroisse.

Dix ans plus tôt, déjà dix ans…

 

Oui, déjà dix ans, quasiment jour pour jour, séparent l’ordination du Père Romain Tavernier de la célébration vécue dimanche 27 juin en l’église Notre-Dame-de-l’Assomption de Villeneuve-sur-Yonne. Comme lors de son ordination le 26 juin 2011, ses parents l’entouraient , et nul doute que bien des souvenirs leur revenaient….

A l’issue de la messe dominicale, les paroissiens présents furent invités à l’entourer dans la salle paroissiale, pour un verre de l’amitié fêtant ces dix années au service de l’Église et du Christ. Une quarantaine de personnes, paroissiens, amis et famille, partagèrent avec lui le pique-nique empreint de joie et de convivialité: les nombreux gâteaux préparés témoignaient d’un anniversaire pas tout à fait comme les autres...

L’occasion était belle de faire un retour sur ces dix années de service.

 

Romain, que pourrais-tu dire sur le « fil d’or » de ces années ? (le tutoiement est quasi de rigueur avec le Père Romain, des années de scoutisme obligent...)

J’ai, pour ma part, un rapport particulier au temps en ceci qu’il me semble que ce fut un long temps que cette période de 10 ans. L’époque où j’ai été prêtre à Saint-Florentin (3 ans) puis à Joigny( 3 ans) me semble appartenir à d’autres vies.

 

Ici à Villeneuve comme je rencontre beaucoup de personnes, le temps a une forte densité .

J’ai passé mes trois premières années de prêtre aux côtés du Père Alain Raynal où je célébrais déjà les sacrements : baptêmes, mariages etc.

Mais surtout, je m’occupais beaucoup des jeunes, j’étais responsable des jeunes d’Auxerre et de l’Auxerrois : j’ai beaucoup côtoyé le Père Joël Rignault et je suis heureux de pouvoir encore le faire puisqu’il est à Sens.

J’étais aumônier à Saint-Joseph, je m’occupais des scouts de France, de l’aumônerie du privé et du public avec son lot de retraites pour un trentaine d’enfants dans chacune d’elles.

 

Durant ces dix ans, je me suis senti vraiment à ma place comme prêtre diocésain et ce furent des années heureuses. Comme curé je vis une unité de lieu et de mission qui me convient. En effet il m’était plus difficile d’avoir des missions différentes, dans des lieux différents, et je pouvais me sentir parfois « écartelé ». Pour moi ça devient compliqué lorsque les missions se rajoutent car j’ai besoin de connaître les personnes.

 

En ce qui me concerne le « fil conducteur» a clairement été la mise en place d’équipes de servants d’autel qui constitue le premier chantier d’une paroisse et la rajeunissent. Par exemple à Saint-Florentin la mise en place des servants d’autel a donné un véritable élan à la paroisse, tout comme à Villeneuve-sur-Yonne et cela attire de nouvelles familles.

En effet, avant d’être curé, je m’occupais exclusivement des jeunes, que ce soit dans la préparation de BAFA, les scouts, les pèlerinages ou les JMJ (Journées Mondiales de la Jeunesse instaurées par Jean-Paul II).

Avoir affaire avec des adultes a été pour moi le plus gros changement lorsque je suis devenu curé de paroisse : auparavant j’étais toujours avec les enfants, d’où le tutoiement. Être curé de paroisse pour tous les âges a constitué une sorte de « rééquilibrage», car auparavant je ne m’occupais que de jeunes.

 

Romain, quel est le rythme d’une paroisse ?

Je dois dire que, jusqu’à présent, c’est à Villeneuve que je suis resté le plus longtemps : cela fera bientôt quatre ans que je suis ici alors que j’ai été curé à Joigny et à Saint-Florentin pendant 3 ans.

 

En général la première année on « s’observe » mutuellement.

 

La seconde année c’est la « guerre civile » (rire de Romain ) Souvent il y a une forme d’inertie, de résistance face aux changements qui font peur et déstabilisent les paroissiens. C’est souvent une année un peu difficile où l’on peut être confronté au découragement, parfois un moment désespérant et pour lequel, pourtant, on a donné sa vie, faisant une croix sur pas mal de choses…

C’est une année où il faut prendre des décisions, pas toujours bien accueillies et qui engendrent des incompréhensions.

La bienveillance est vraiment nécessaire, particulièrement à ce moment là, pour arriver au dialogue, même rugueux. Et puis les personnes finissent par accepter, de part et d’autre et à s’adapter mais il ne faut jamais «casser » qui que ce soit.

En effet , quand le prêtre a une expérience de 6 ans sur le terrain, a travaillé à la formation de ses paroisses précédentes, a vu ce qui fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas, il y a forcément un décalage avec ses nouveaux paroissiens qui ont une expérience différente.

J’insiste vraiment sur la bienveillance réciproque, et ce n’est pas propre aux communautés paroissiales.

Au final quand les projets réalisés ont bien marché, le soutien arrive. Par exemple dans la mise en place des servants d’autel, je me sens accompagné, car le collectif fonctionne. Les enfants sont malléables et n’ont pas les a-priori des adultes . J’ai d’ailleurs beaucoup prêché sur la théologie de l’enfance : « Si vous ne redevenez pas comme des petits-enfants…. »

 

La troisième année , après les grosses difficultés, le cap est passé et il faut avancer. C’est généralement une période où l’on récolte les fruits, par exemple les nombreux catéchumènes qui demandent les sacrements, une période plus sereine, apaisée.

 

 

Romain, es-tu un prêtre heureux?

Clairement et sans hésitation, oui, au point que si j’avais su dès le début ce que serait ma vie de prêtre, avec ses ombres et ses lumières, je n’aurais eu aucun doute.

C’est pour moi une fonction des plus heureuses, qui procure une vie très riche autant par la diversité que par la densité.

Dans les moments plus difficiles, on ne supporte pas, on traverse : on passe par la croix puis advient la résurrection.

Au séminaire nous avons une formation humaine, pastorale et spirituelle, une formation très complète: nous avions trois ou quatre retraites chaque année, des accompagnements spirituels tous les 15 jours etc.

Dans mon ministère j’ai vraiment besoin d’avoir un rythme personnel, avec des temps de pause dans un vie très dense, et l’accompagnement spirituel me resitue bien dans la fonction spirituelle. Le prêtre est un homme de Dieu, un homme de prière.

Je suis toujours entouré de mes frères prêtres mais quand on est curé, on est seul. Et parfois ça donne le vertige car personne n’est là pour vous dire si ce que vous faite est bon ou mauvais.

 

Quels ont été les moments les plus marquants au cours de ces dix années ?

Je dirais que ce sont les grandes fêtes liturgiques, comme par exemple les baptêmes par immersion, cette célébration que nous avons pu vivre récemment, où tout est récapitulé, où l’on donne beaucoup de soi.

C’est le sommet de la vie paroissiale, c’est un temps fort pour les paroissiens, pour le prêtre.

D’une manière plus quotidienne, c’est ce que je partage avec les servants d’autel : lorsqu’ils sont autour de moi, c’est un peu comme s’il y avait les douze…

 

Le Père Romain, un prêtre heureux...Souhaitons très fort qu’il soit entouré de...paroissiens heureux : un chantier pour chacun de nous !